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Soutenir la recherche en éducation en Afrique francophone subsaharienne : un enjeu partagé par FEI et ses partenaires de la Francophonie

Séminaire international « Produire et diffuser la recherche en éducation en Afrique francophone », 19 octobre 2021

La recherche en éducation en Afrique francophone subsaharienne est vivante et dynamique. Elle est le produit d’engagements individuels de chercheuses et de chercheurs et s’organise dans le cadre de politiques d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche, d’équipes de recherche ou d’organisations privées.Cependant, force est de constater que les produits de cette recherche sont souvent trop peu connus.

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D’une manière générale, les résultats des grands projets soutenus ou coordonnés par les institutions de coopération bénéficient des canaux de diffusion propres à ces organisations. En revanche la recherche individuelle ou en équipes est peu visible et son impact en termes de connaissance et d’aide à la décision reste limité.

Comme le souligne Abdel Rahamane Baba-Moussa, secrétaire général de la CONFEMEN, l’état de la recherche en éducation en Afrique subsaharienne francophone pose un réel problème à une époque où on s’accorde à reconnaître que les politiques publiques et les pratiques doivent s’appuyer sur les connaissances produites par la recherche scientifique. Comment créer les conditions d’une meilleure diffusion nationale, régionale et internationale des résultats de recherche ? Comment favoriser ainsi les synergies entre chercheurs ? Comment mieux renseigner les prises de décision politiques ? Voilà des questions importantes pour le progrès des systèmes éducatifs en Afrique francophone subsaharienne.

 

Une faible interaction entre les chercheurs et un manque de cartographie de la recherche en éducation

C’est ce constat qui a poussé France Éducation international à constituer en 2020 trois groupes de travail alliant chercheurs du Nord et du Sud, dans le but d’étudier trois thématiques interdépendantes : la recherche en/sur l’éducation en Afrique francophone, les dispositifs de veille et l’organisation d’un dispositif d’aide à la rédaction scientifique à destination de jeunes chercheurs de cette zone. Les groupes de travail ont été réunis sous la forme d’ateliers en ligne le 16 septembre 2021, afin d’exposer leurs résultats et de les soumettre à la discussion au sein d’un public composé d’une soixantaine de chercheurs de 13 pays dont 9 d’Afrique, et de responsables de revues et d’institutions multilatérales.

Le bilan de ces groupes de travail a confirmé la trop faible interaction entre les acteurs de la recherche en éducation, qui se caractérisent par une grande diversité ; on les trouve au sein des institutions académiques, des organisations internationales et de quelques institutions régionales, avec souvent des confusions entre recherche et expertise (bien plus rémunératrice). Il manque une cartographie des lieux de recherche, des équipes de recherche, des chercheurs, des projets de recherche et des financements.

S’en suit une très faible visibilité et un manque de reconnaissance de la communauté scientifique en éducation, tant au sein du monde des chercheurs que de la sphère de la décision politique et des acteurs de terrain. Ce constat explique en grande partie la quasi-inexistence d’institutions de veille en Afrique subsaharienne, la difficulté d’exercer en tant que chercheur, et la difficulté à mettre en place des dispositifs de soutien à la publication scientifique des jeunes chercheurs. 

Par ailleurs, la seule base de données (African Education Research Data Base) qui existe sur le continent africain pour recenser la recherche en éducation ne comprend que très peu les publications en langue française. Quant au seul site en Afrique qui recense les revues savantes africaines (toutes disciplines confondues), African Journals OnLine, moins de 10% des revues africaines identifiées concernent l’éducation, parmi lesquelles aucune revue francophone. Or, il existe de nombreuses revues nationales et quatre revues régionales francophones.

Ce constat fait apparaître la nécessité à la fois d’avoir une cartographie de la recherche en éducation et un site recensant les revues francophones en Afrique subsaharienne, mais aussi de mettre en place des dispositifs pour obtenir des recensements exhaustifs et régulièrement mis en jour. Ces besoins rencontrent ceux des institutions de veille, afin qu’elles puissent servir tant les chercheurs dans l’accès aux publications que les acteurs qui ont besoin des connaissances produites par la recherche pour prendre leurs décisions ou améliorer les pratiques de terrain.

 

Des actions prioritaires identifiées, parmi lesquelles un « ouvrage de référence »

Les débats engagés le 16 septembre ont été poursuivis par un séminaire en ligne, co-organisé le 19 octobre 2021 par France Éducation international et plusieurs institutions partenaires de la Francophonie : la CONFEMEN, l’AUF, l’IFEF/OIF. L’objectif était d’avancer dans la réflexion et de croiser les points de vue du terrain et des organisations qui soutiennent la recherche en Afrique francophone. 

À travers un panorama des projets de soutien existants dans le domaine, les interventions ont permis d’affiner la compréhension des besoins, des attentes, des articulations à trouver entre les actions des parties prenantes et des défis à relever. Elles ont en outre confirmé la nécessité d’assurer une synergie entre les milieux de la recherche et ceux de l’action publique, afin que les prises de décisions politiques soient en cohérence avec les résultats de la recherche.

Ce séminaire a mis en avant les actions prioritaires à mener, complémentaires les unes des autres, parmi lesquelles le développement de mécanismes de veille et d’études prospectives ainsi que le soutien à la création et à la publication de revues scientifiques. La mise en place d’une structure transversale de coordination/médiation pour favoriser le dialogue entre les chercheurs, les décideurs et les acteurs de terrain a également été évoquée. Le projet d’une Académie des Sciences de la Francophonie basée au Maroc, proposé par l’AUF, pourrait précisément constituer un cadre de partage d’information entre chercheurs et décideurs politiques.

Enfin, le besoin de cartographier l’état de la recherche en éducation en Afrique subsaharienne francophone et de produire un « ouvrage de référence » sur les travaux et les résultats de cette recherche (ce qui nécessiterait une étude de faisabilité préalable) a été rappelé. En appui à cet objectif, deux temps d’échange et de réflexion ont été proposés, portant sur les pratiques de veille des chercheurs et sur la méthodologie pour réaliser un inventaire régulièrement actualisé des publications africaines francophones en éducation.

Les temps d’échanges et de débats devraient aboutir à l’élaboration d’un « plaidoyer » à destination des décideurs politiques, des chercheurs et des acteurs de l’éducation, qui pourrait être présenté lors de la prochaine ministérielle de la CONFEMEN. 

France Éducation international, engagé depuis près de trente ans en faveur de la recherche en éducation à travers la Revue internationale d’éducation de Sèvres, se réjouit du travail mené en collaboration avec les institutions francophones partenaires autour de cette problématique de premier plan.